La compétence principale du foreur de pompe est bien sûr le forage du tronc dans le sens de la longueur. Le forage se fait en plusieurs étapes dans une spectaculaire installation, en recourant à différents jeux de tarières. Un perçage régulier et précis dépend de nombreux facteurs tels que l'expertise, l'expérience et un bon équipement. Des noeuds dans le bois au centre du tronc peuvent rendre le forage difficile. Au total, il faut environ huit heures pour percer un tronc de quatre à cinq mètres, une activité très éprouvante pour deux à trois personnes. Notre expérience nous a révélé que, par manque d'expérience, il valait mieux faire appel à une équipe de trois ou quatre personnes pour effectuer le forage de manière optimale, ce qui permet de se relayer.
Installation de perçage avec trois tréteaux (Devlieger, Landelijk en ambachtelijk leven)
Le tronc de l'arbre repose sur deux tréteaux à une hauteur de travail confortable d'environ 80-100 cm et est fixé à l'aide d'un étrier et de chaînes. Le forage se faisant souvent sur un terrain accidenté, les tréteaux sont placés aussi horizontalement que possible.
La longue tarière repose sur un chevalet en bois réglable, qui doit être déplacé régulièrement avec la tarière. Nous avons choisi un modèle à trois pieds, plus stable qu’un chevalet à quatre pieds qui peut se déformer lorsqu’on tourne ou qu’on retire la tarière. Les dessins anciens montrent de nombreuses variations de cette installation, comme un troisième chevalet ou d'autres constructions sur lesquelles repose la tarière. L’essentiel est que le chevalet soit équipé d'un dispositif réglable pour maintenir la tarière à la bonne hauteur. Ici, il s'agit d’un bloc à trous et d’une broche en fer sur laquelle repose la tarière. La broche peut être insérée dans des trous à différentes hauteurs.
Avant d’aligner le trou de forage avec des cordes ou des lignes, il faut déterminer le point central aux deux extrémités du tronc, à l’aide un fil à plomb et d’une équerre. On place ensuite deux lattes, horizontalement et verticalement. Entre les deux, on tend deux cordeaux, parallèlement à la ligne centrale du tronc. Cela permettra de contrôler visuellement la position de la tarière pour percer le tronc en ligne droite. Notre expérience nous a appris qu’il faut vérifier régulièrement, compte tenu des énormes forces qui s'exercent sur la tarière et le chevalet. On peut également utiliser un cordeau pour marquer une ligne droite sur le tronc à l'aide de suie, de charbon de bois ou de pigment.
La tarière est fixée à une manivelle en bois solide avec une cale. Des manivelles à deux bras et à quatre bras figurent dans les collections. Luc Verachtert a fait une réplique robuste de chaque modèle avec des ferrures en métal. La longueur des bras de la manivelle est cruciale. Pendant la rotation, nous nous sommes rendu compte que les bras de notre manivelle auraient pu être plus longs d'une dizaine de centimètres afin d'utiliser de manière optimale l’effet de levier.
Pour resté affûté, le tranchant de la tarière ne demande que peu d’entretien. Son efficacité est principalement due à sa forme géométrique, qui mérite d'être étudiée plus avant. Elle est le résultat du savoir-faire du forgeron. Le tranchant intérieur de la perceuse ne nécessite qu’un petit coup de lime. Lors de sa visite, le foreur de pompes Oscar De Wagter a confirmé que cela ne se faisait que sur la face intérieure. En limant légèrement ou en traçant une marque avec un marqueur, on peut vérifier où l’endroit où l'acier de la perceuse perce le tronc.
Pour que la longue tarière reste stable au milieu du tronc pour le premier forage, on perce d’abord un trou d'environ dix centimètres, avec un amorçoir, ou encore avec une tarière à main ou une gouge de menuisier.
La première longue perceuse est une tarière à pompe d'un diamètre de 4 cm, qui perce le tronc sur toute sa longueur grâce à son nez coupant. Les copeaux de forage sont recueillis dans une sorte de cuillère d'environ 25 cm de long. La tige de cette tarière ne dépasse pas 10 à 15 cm. Son trou rectangulaire permet l’insertion d’une rallonge, à laquelle elle est fixée par une goupille de fer ou un boulon. Parfois, la tarière est forgée sur une très longue tige, de sorte qu'aucune extension n'est nécessaire. Dans notre exemple, la tarière et sa tige ne forment qu’une pièce.
Ensuite commence le forage proprement dit. Chaque fois que l'on fait tourner la tarière d'un quart de tour, elle se remplit de copeaux de bois. Après une dizaine de rotations, la tarière est pleine et doit être retirée du tronc pour être vidée. Au cours de notre expérience, la tarière s’est souvent trouvée complètement bloquée et a dû être extraite avec beaucoup de force, grâce à plusieurs quarts de tour sur la tige, exercés par trois ou quatre personnes. Une fois la tarière extraite, il faut évacuer les copeaux restants en faisant entrer et sortir quelques fois la tarière dans le trou, sans exercer de grande force. Ce qui, dans la première phase en particulier, a entraîné un certain retard. Peut-être forions-nous à contre-sens des fibres du bois, ou rencontrions-nous des nœuds? L’arbre avait-il poussé de manière irrégulière ou y avait-il des torsions dans le tronc, si bien que nous n’étions plus au cœur du tronc? La pratique du métier, l’expérience et la finesse jouent ici certainement un rôle.
Après plusieurs heures de forage, nous ne parvenions plus à enfoncer la tige plus profondément. Nous avons alors tourné le tronc de 180° pour forer de la même façon à l'autre extrémité. Grâce au savoir-faire de nos menuisiers, les deux trous percés de part et d’autre au coeur du tronc se sont rejoints avec une grande précision. Après environ quatre heures, le tronc entier était percé sur un diamètre de 4 cm.
Modifier la l’installation comporte évidemment un certain risque. Si l’on dispose d’assez de place, il suffit de déplacer le chevalet à l'autre bout du tronc et d’y refaire l'installation. Si l’on dispose de tarières ou d’extensions suffisamment longues, jusqu’à 4,5 mètres, il est possible de forer tout le tronc dans une seul en même sens.
Le trou existant doit maintenant être progressivement élargi à 5 ou 6 cm sur toute sa longueur à l'aide d'un ou plusieurs alésoirs, ou tarières de forme légèrement conique. La géométrie des tarières produit de beaux copeaux de bois uniformes. Faire tourner la tarière nécessite moins de force que lors de la première étape. Une seule personne suffit parfois pour actionner la manivelle.
Cette tarière à pompe possède à son extrémité un crochet caractéristique qui a une double fonction. Le crochet extrait les copeaux du trou. On peut aussi y attacher une corde qui passe à travers le trou de forage jusqu'à l'autre côté du tronc. Une troisième personne peut alors tirer cette corde pour accélérer le mouvement de la tarière. Ceci nécessite une bonne coordination entre le(s) différent(s) opérateur(s). La corde s'enroulant en raison des nombreuses rotations, elle doit donc être régulièrement déroulée. Pour obtenir une puissance de traction encore supérieure, nous avons attaché la corde à une construction temporaire avec un treuil.
La partie supérieure du tronc, qui dépassera partiellement du sol, est maintenant agrandie sur environ 1,2 m pour former le corps de la pompe, le mécanisme qui va aspirer l'eau. Cela se fait à l'aide d'une tarière plus courte, plus large et fortement incurvée, avec une tige courte et incurvée. La forme et l'utilisation de ce type de tarière ressemblent beaucoup à la tarière à moyeu du charron.
Selon le type de pompe, une tarière plus large est fixée pour agrandir le trou de 5 à 6 cm à environ 8 à 10 cm. Les plus larges tarières à pompe que nous avons trouvées mesurent jusqu'à 14 cm de large. Comme les petites tarières, elles peuvent être élargies par la fixation d’une plaque métallique incurvée de 0,5 à 1 cm d'épaisseur du côté non tranchant. Dans le langage populaire, on appelle cela une "coquille". Deux trous sur le côté sont souvent prévus pour la fixer. L’artisan peut ainsi percer deux trous de diamètre différent avec une seule et même tarière.
La transition entre le large corps de la pompe et la cavité plus étroite du canal d'eau à travers le tronc est légèrement conique, de sorte que la chopinette puisse être fermement enfoncé dans celle-ci pour empêcher l'eau de passer.